Selon le quotidien Libération du 6 septembre 2012, le Pr Luc Montagnier, Prix Nobel de Médecine, a récemment « mis en cause l’intérêt des vaccins, suggérant que certains soient même la cause de l’autisme ». Des propos qui n’ont pas plu à ses collègues. Alors qu’il devait être désigné pour présider un laboratoire de recherches au Cameroun, dans une démarche inédite, 44 Prix Nobel viennent d’écrire au président du Cameroun pour s’inquiéter de cette nomination, prétextant que les propos de Montagnier sur les vaccins pouvaient avoir « un impact désastreux sur la qualité du système de santé au Cameroun », et dénonçant « ses solutions, qui n’ont aucun début de preuves scientifiques ».
Répondant à l’invitation d’une association américaine de parents d’enfants autistes, AustismOne, le Pr Montagnier s’est exprimé publiquement le 27 mai 2012 à Chicago.
Le corps du délit
Après avoir décrit la nouvelle technologie de détection de l’ADN bactérienne dans le sang, ainsi que les résultats obtenus en Europe par le traitement antibiotique dans l’autisme résultant de sa théorie sur le passage de bactéries dans le cerveau pouvant affecter la maturation des neurones chez les enfants, le Pr Montagnier s’est exprimé sur les vaccins :
« Parmi les origines multifactorielles de l’autisme, je ne cite jamais les vaccinations. Cependant, Forbes a publié un article : Le Lauréat du prix Nobel rejoint les anti-vaccinalistes.
Ma position sur les vaccins n’a pas changé au cours des trente dernières années : le principe s’est révélé être excellent au cours du passé. La variole a été éradiquée dans le monde au moyen du virus atténué de la vaccine. Mais certains ont dû payer un prix terrible : l’encéphalite pour un certain nombre d’enfants. Au fil des ans, les vaccinations contre les bactéries et les virus se sont multipliées, apparaissant comme le moyen le plus rentable pour prévenir les épidémies. Toutefois, les effets secondaires sont de plus en plus importants et la survenue d’un unique décès ne peut être tolérée plus longtemps.
Beaucoup de parents ont observé une association temporelle — qui ne signifie pas causalité — entre une vaccination par piqûre et l’apparition de symptômes de l’autisme. Cela ne devrait pas être négligé par la communauté médicale et les décideurs en santé publique. Il est donc primordial d’étudier les facteurs de risque, à la fois génétiques et environnementaux, qui pourraient être impliqués afin de les prévenir.
Vraisemblablement, la vaccination, en particulier la vaccination contre de multiples antigènes, pourrait être un élément déclencheur d’une situation pathologique préexistante chez certains enfants.
Les négationnistes des vaccins ne sont pas les personnes courageuses qui soulèvent le problème des accidents de vaccination, mais sont ceux qui nient l’existence de ces accidents tragiques. Ces derniers croient en le dogme « Les vaccins sont bons », point. Ils oublient le serment d’Hippocrate « Primum, non nocere. » Tout d’abord, ne pas nuire. »
Le 6 février 2008, dans le cadre de l’émission télévisée C dans l’air, il avait déjà tenu des propos comparables sur « le vaccin de l’hépatite B et la sclérose en plaques. On nous dit que les études montrent qu’il n’y a pas vraiment de fond […] mais il y a quand même une corrélation temporelle. Or quand il y a un phénomène, on ne peut pas tout à fait l’ignorer. Il ne faut pas dire que cela n’existe pas. Il faut faire de la recherche, et de la recherche médicale pour trouver le petit nombre de gens qui sont génétiquement prédisposés à la sclérose en plaques, et éviter qu’ils soient vaccinés. »
Le Pr Montagnier avait également déclaré n’avoir aucune raison de se faire vacciner contre la grippe : « je n’appartiens à aucun des groupes considérés comme population à risque. Et puis les anciens ont une sorte de mémoire immunitaire qui les protège contre ces types de virus » (La Repubblica, 17 octobre 2009).
Ces critiques lucides et somme toute modérées d’une certaine politique vaccinale aveugle et trop systématique, émanant d’un vaccinaliste de l’Institut Pasteur, justifient-elles la déclaration de guerre de ses collègues ?
Faut-il voir derrière cette démarche calomnieuse et pour le moins inédite l’œuvre des laboratoires pharmaceutiques ?
Certains des signataires de la pétition adressée au président du Cameroun ont à l’évidence des liens d’intérêts avec ces derniers. C’est le cas de Sir Richard J. Roberts qui dirige le New England Biolabs, société privée qui travaille avec les labos en particulier pour la mise au point de vaccins ou encore d’Harald Zur Hausen dont les recherches ont mené au développement des vaccins contre le cancer du col utérin.
Le procès en sorcellerie
Le magazine économique Forbes nous en donne des éléments de réponses dès le 27 mai 2012. Qualifiant cette conférence de Chicago de « véritable festival des revendications non prouvées » et après avoir présenté l’un des invités à « ce festival de la pseudoscience », Andrew Wakefield, « médecin discrédité qui a falsifié des études pour établir un lien de causalité entre l’autisme et le vaccin ROR », Forbes s’étonne d’y voir le Pr Montagnier :
« Dans un effort désespéré pour rester pertinent, faire la promotion de théories sauvages sans fondement scientifiques et profiter des parents vulnérables pour proposer un traitement antibiotique pour leurs enfants autistes. […] Ce n’est pas la première idée folle de Montagnier : il y a tout juste un an, il a affirmé que les molécules d’ADN pouvaient se téléporter entre tubes à essai, idée reposant sur une sorte de mystification quantique. Cette idée loufoque devrait être ignorée […] Il a également approuvé l’homéopathie, un autre traitement de charlatan.»Les bases du procès en sorcellerie sont donc posées.
Une défense solide et rationnelle
Forbes commet une erreur grossière en parlant de téléportation. Il s’agit en réalité de la transmission à un laboratoire à distance, via internet, des données numérisées de la signature électromagnétique d’une séquence d’ADN. Le laboratoire récepteur (en Italie et en Allemagne) constata que cette signature numérisée équivalait en tous points à la présence physique de la séquence d’ADN. Le Pr Montagnier a présenté pour la première fois à la conférence Nobel à Lindau, en juin 2010, la preuve de transmission à distance de la signature électromagnétique d’une séquence d’ADN, (la LTR fragment du VIH).
Le Pr Montagnier avait également rendu publiquement hommage, le 27 octobre 2007, à Lugano en Suisse « à Jacques Benveniste, qui était un de mes collègues. Au début, je ne l’ai pas suivi dans ses percées tout à fait nouvelles mais il se trouve que mes travaux sur le virus du sida ont conduit à me rapprocher de ses idées ».
Propos qu’il reprend dans son dernier livre, Les combats de la vie, paru en février 2008 : « Le modèle de l’industrie pharmaceutique est de moins en moins pérenne. Il faut […] revoir tout notre système de santé. La biologie moléculaire […] a atteint des limites et elle n’explique pas tout. Certains phénomènes, comme l’homéopathie, restent mystérieux. Je fais allusion à certaines idées de Jacques Benveniste (le scientifique qui a inventé la « mémoire de l’eau ») car j’ai récemment rencontré des phénomènes que seules ses théories semblent pouvoir expliquer.
Je pars d’observations, pas de croyances. Certaines choses nous échappent encore, mais je suis convaincu qu’on saura les expliquer de la manière la plus rigoureuse. Encore faut-il pouvoir mener des recherches à ce sujet ! Si l’on commence par nier l’existence de ces phénomènes, il ne se passera rien. J’ai la chance d’avoir pu faire mes preuves dans la « grande science » en particulier dans l’identification du virus du sida. Je me sens libre d’explorer de nouveaux domaines et d’en dériver des concepts originaux, même s’ils prêtent à controverse. »
In fine, laissons la parole au Pr Montagnier qui déclarait le 21 juin 2012 : « j’exhorte mes collègues scientifiques et médecins — et en particulier les lauréats du prix Nobel — à participer à cette aventure inspirante, au lieu d’être négatifs et d’alimenter un combat d’arrière-garde. »
Dr Marc Vercoutère, 15 octobre 2012