Qu’est-ce que la nanotechnologie ?
Une partie de la nanotechnologie s’intéresse aux nanoparticules. Le diamètre de ces particules est inférieur à 100 nanomètres (1 nanomètre = 1 milliardième de mètre). Les particules de cet ordre de grandeur ont des propriétés chimiques et physiques différentes de celles des particules plus grosses de même composition chimique. Voici quelques exemples de propriétés physiques différentes : apparition de magnétisme, de conductibilité électrique, modifications de couleur (par exemple les nanoparticules d’or sont rouges).
La création de ces nanoparticules donne aux matières des propriétés toutes nouvelles qu’on ne rencontre pas dans la nature et dont les effets sur les hommes, les animaux et l’environnement sont encore problématiques. Ainsi, une étude de l’université de Rochester sur des souris a montré que l’exposition à des grosses particules de téflon provoquait, certes, chez ces animaux des réactions morbides mais qu’ils s’en remettaient assez bien après un certain temps. Mais exposées pendant 15 minutes seulement à des nanoparticules de téflon de 20 nanomètres, toutes les souris mouraient au bout de 4 heures. La toxicité des nanoparticules réside probablement dans leur petite taille.
On peut comparer à différents égards la nanotechnologie au génie génétique : ils interviennent tous les deux dans des processus vitaux. On présente la nanotechnologie comme la technologie-clé du XXIe siècle et on prétend qu’elle révolutionnera notre alimentation.
Frites au ketchup au dioxyde de silicium ou mousse au chocolat au dioxyde de titane ?
Il existe déjà des aliments et des emballages de la nano-génération bien qu’il n’y ait jamais eu de débat sur la question. On enferme déjà des colorants, des arômes et des vitamines naturels dans des nano-capsules que l’on mélange à des boissons. On ajoute artificiellement des nanoparticules à des aliments : ainsi certaines variétés de ketchup contiennent du dioxyde de silicium, ce qui les rend plus épaisses. On ajoute aux vinaigrettes du dioxyde de titane comme agent blanchissant et les silicates d’aluminium sont censés empêcher l’agglutination des aliments en poudre.
Des risques inconnus ?
Lorsque des fabricants introduisent de manière ciblée des nanoparticules dans des aliments, des produits de beauté ou des médicaments, ces particules entrent en contact avec la peau ou le système digestif. Dans l’état actuel de la recherche, les risques sont considérables. Les nanoparticules exogènes peuvent pénétrer dans des couches de tissus inaccessibles aux plus grosses particules. Combien de temps y restent-elles et quels sont leurs effets ? On ne connaît pas non plus l’effet des nanoparticules sur le cerveau. Comme elles sont minuscules, elles peuvent passer la barrière hémato-encéphalique qui n’est, en principe, pas facile à franchir. On sait encore peu de choses sur les effets des substances étrangères non solubles. On a des raisons de penser qu’elles peuvent provoquer des modifications inflammatoires.
Il existe également quelques études scientifiques animales sur ces effets. Il y a deux ans, des essais ont fait grand bruit : on a constaté que des nanoparticules de carbone appelées « buckyballs » endommageaient le cerveau de certains poissons. Des dommages aux poumons ont également été observés dans des études animales. De petits tubes de carbone, les nanotubes, peuvent, après avoir été inhalés, rester dans les poumons et s’y agglutiner. Des expériences sur des rats ont montré que ces agrégats était suffisamment gros pour boucher les bronches. On connaît depuis longtemps des effets semblables provoqués par l’amiante. Certes, les nanotubes sont 1000 fois plus petits que les fibres d’amiante, mais dans des expériences de l’EMPA (institut suisse de recherches en sciences des matériaux et en technologie), ils s’agglutinaient pour former de grosses aiguilles et ressemblaient, par leur aspect et leur toxicité, aux fibres d’amiante. Ils se sont révélés particulièrement dommageables pour les cellules. Aussi, les nanotubes s’avèrent-ils extrêmement problématiques d’un point de vue toxicologique.
Pas de quoi fouetter un chat ?
Que disent les assurances ?
Connaissant les risques, comme pour l’énergie nucléaire ou le génie génétique, les assurances craignent des dommages imprévisibles de grande ampleur qu’elles ne sont pas prêtes à couvrir sans restrictions. Contrairement aux déclarations euphoriques de l’économie, la compagnie de réassurance Swiss Re évalue sans doute les risques de manière réaliste. En 2004 est paru son rapport sceptique, très remarqué, intitulé : « Nanotechnology, small matter, many unknowns (Zurich, 2004) ». L’un des plus gros réassureurs du monde parvient à la conclusion que les nanotubes pourraient avoir les mêmes effets que l’amiante sur la santé humaine. Il recommande aux assurances de limiter la responsabilité en matière de risques dûs à la nanotechnologie. Cette recommandation, qui rappelle celle faite en matière d’énergie nucléaire et de génie génétique, laisse fortement penser qu’il y a là pas mal de choses qui clochent.
Et les consommateurs ?
On ne cesse d’approvisionner les supermarchés en nanoproduits (aliments, produits d’entretien, cosmétiques, etc.) et malgré d’importantes réticences, le secteur se mure dans le silence. Pour ne pas entraver le développement du marché, on a jusqu’ici évité d’aborder publiquement le sujet ou on l’a présenté surtout positivement. On attend encore un large débat. Dans le domaine alimentaire tout particulièrement, les consommateurs réagissent de manière très sensible. Le refus catégorique des aliments génétiquement modifiés en est un exemple.
Les départements de relations publiques des grands groupes veulent empêcher les réactions négatives des consommateurs grâce à une meilleure communication se focalisant sur les avantages de la nanotechnologie. On veut absolument éviter que la population ne refuse cette technologie comme elle le fait pour les OGM.
Des scientifiques mettent en garde contre ces substances. Le groupe canadien ETC6 a demandé, en 2003, un moratoire sur les nanoproduits en raison des risques imprévisibles qui sont à craindre…
Source : www.alterinfo.net
extraits de l’article de Yvonne Rappo
du 7 mars 2008